EVENEMENT  LOTIEN

Exposition Dennis NONA

Rochefort Hôtel Hèbre de Saint-Clément

(3 juin-30 septembre 2011)

 

En raison d’un empêchement, le Président Yves Nicolas m’a demandé de représenter l’AIAPL au vernissage de cette remarquable exposition, sous la présidence du Maire de Rochefort et de l’Ambassadeur d’Australie.

L’hôtel Hèbre de ST Clément, Musée d’Art et d’Histoire, consacre un département important aux Arts Océaniens et  Dennis Nona y trouve très naturellement sa place.

L’artiste est né il y a 38 ans sur la petite île de Badu  dans le détroit de Torrès  séparant l’Australie de la Nouvelle Guinée. D’un aspect massif, très réservé, malgré sa célébrité et ses titres prestigieux, Dennis très économe de mots,  s’exprime essentiellement par ses œuvres, estampes (linogravures) et sculptures. Stéphane JACOB, Directeur de la Galerie Arts d’ Australie apporte  un éclairage très utile sur les conditions de leur réalisation.

 Sur le seuil avait été aménagée une petite plage de sable encerclée de grosses pierres pouvant servir de siège. Dennis s’assied sur l’une d’elles et nous explique que les pêcheurs de Badu procèdent ainsi,  le détroit très peu profond émergeant à marée basse. Il tire alors de sa poche une cordelette d’algues locales tressées et à l’arrivée du flux la promène entre les rochers. Les poissons portés par le courant --- on croit presque les voir--- sont endormis par le suc de ces algues et les pêcheurs peuvent entasser les plus gros dans des couffins végétaux. Les plus petits reprendront connaissance quand la mer montante aura suffisamment dilué le poison. J’imaginais les souvenirs d’enfance de Julien Viaud dans les écluses à poissons d’Oléron !

Puis Dennis, comme piqué par une vive, frotte la blessure avec le suc pour apaiser la douleur. Si cela avait été une raie, il aurait pris dans une autre poche un lait provenant d’une liane de l’intérieur des terres.

Dennis nous explique alors que toutes ses œuvres décrivent la vie de ces pêcheurs, soit à partir de ce qu’il a observé lui-même, soit à partir des transmissions orales des générations précédentes, qu’il complète en se recueillant longuement de nuit avec l’esprit de ses ancêtres.

 Les œuvres se caractérisent par des proportions souvent monumentales, crocodile en bronze de 4 m ou linogravure de 6 m par exemple, et par l’extrême fouillis et la diversité des détails dont elles sont couvertes. Chaque pièce, en plan ou en volume, raconte une histoire se déroulant à la fois dans le temps et dans l’espace. Si leur compréhension demande un examen minutieux, leur perfection et leur beauté sont perçues en l’instant.

Un visiteur lotien recherchant des analogies, retrouve un peu l’atmosphère des écrits du Maître dont l’encre parvenait ainsi à enchanter les cinq sens comme dans la description de l’orchestre du Maharajah de l’Inde sans les Anglais.

Mais, quel contraste dans la traduction donnée par les deux artistes à leurs observations :

Pour Dennis, la mer est le milieu naturel de l’homme, elle le nourrit et le berce. La nuit dans sa case, plusieurs heures après la piqûre de la vive, la douleur s’enfle au flot montant, mais disparaît au jusant. On est loin des frayeurs de l’enfant Loti devant cette immensité noire et effrayante.

Pour Dennis, l’esprit des disparus est toujours proche et l’assiste. La quête spirituelle désespérée de Loti, elle, est demeurée sans réponse. 

Patrice Becquet

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* Photos Patrice Becquet, reproduction interdite.