L’exposition qui s’est tenue à La Halle : « Peintres, photographes, illustrateurs contemporains de P. Loti » a connu un grand succès. C’est moins le nombre de visiteurs qui nous a frappés (1800 pourtant en 15 jours), que l’attention et la curiosité dont ils ont fait preuve. Ils n’ont jamais reculé devant une lecture soigneuse de textes explicatifs qui ponctuaient les différents « ilots » de la salle.

Les principaux moments de la présence de P. Loti en pays breton ont été retracés dans leur chronologie. Quatre dessins originaux (portraits masculins et paysages bretons) prêtés par les Musées de la ville de Rochefort ont occupé une place de choix. Merci à C. Stefani, D. Bodin et C. Buffeteau d’avoir rendu possible ce contact direct et inestimable avec le trait de crayon de l’écrivain dessinateur. L’accent a été mis aussi sur ses relations avec P. Scoarnec, grâce à un ensemble de lettres et de documents autographes, adressés à ce « fidèle du Tonkin », depuis la première « embauche » (adressée à Ploudaniel, canton de Lézardrieux), jusqu’à la mort du commandant, en passant par un texte inédit (repris en d’autres termes dans le Journal) consacré à la mort du petit Roger. Nous remercions M. Dudoignon de nous avoir prêté ces documents et autorisés à les exposer.

            Une sélection de peintres ayant pris la région de Paimpol pour source d’inspiration, des œuvres de L. M. Faudacq et d’H. Rivière, ont mis en évidence, au-delà de l’écrivain, le regard d’autres artistes qui, s’ils n’ont pas été inspirés directement par Loti, l’ont été par la Bretagne à la même époque.

            Les photographies originales de Rudaux, collectées par Marc Rapilliard et mises en parallèle avec les gravures de Pêcheur d’Islande constituaient un ensemble remarquable par la qualité de sa présentation.

            Le choix d’ouvrages illustrés prêtés par des particuliers (Danielle Brassaud) ou par la Médiathèque de Rochefort, que nous remercions pour leur confiance et leur générosité, a montré le talent de dessinateurs comme Cheffer, Barthelemy, Gumery, Méheut etc. Un diaporama, rendu possible par le travail de Richard Berrong sur les illustrateurs de Pêcheur d’Islande, a permis de prendre conscience de la variété d’inspiration, de coloris et de style de ces illustrateurs. Une mention particulière doit être faite pour Firmin Bouisset dont les planches originales illustrant Matelot (acquisition récente des Musées de la ville de Rochefort) ont été une découverte pour tous. La finesse et l’expressivité des scènes du roman ont laissé bien des visiteurs dans le ravissement.

           L' AIAPL avait mis à notre disposition un autre diaporama " Les embarquements de Pierre Loti " réalisé par D. Brassaud à partir de cartes postales anciennes du fonds de M. Jean Nonin pour le site de l'association,   diaporama montrant la succession de tous les bâtiments sur lesquels Loti a servi, noms, dates et destination des embarquements etc., qui a beaucoup intéressé tous les spectateurs ayant des liens directs avec la vie maritime. Nous remercions l' AIAPL de ce prêt.

          Un catalogue est en cours de confection. Nous ferons connaître par le biais de l’AIAPL et de l’Association P. Loti à Paimpol la date de sa parution et le moyen de se le procurer.

 

Les rencontres-lectures qui ont ponctué cette quinzaine consacrée à Loti se sont déroulées dans un climat de simplicité et de détente, en divers cadres favorables à la convivialité, bistrots dont le nom dit assez qu’ils convenaient aux rencontres : Corto Maltese (textes de Loti sur la vie à bord), Baroz’arts (textes animaliers entrecoupés de thèmes musicaux par le groupe Grattos) ; librairie « chez l’Oncle Paul » (textes d’enfance et dialogues amoureux) ; et le Musée Renan à Tréguier où un spectacle littéraire et musical proposé par Manuelle Campos a mis en consonance des textes de Loti et de Mac Orlan sur Brest. L’idée fait son chemin de continuer au long de l’année ce genre de rencontres qui dévoilent les aspects les plus divers du style du romancier, tour à tour intimiste, lyrique, caricaturiste.

 

Une séance gratuite au Ciné Breizh a réuni un public nombreux pour la projection des deux téléfilms consacrés à « Loti, un homme du monde » (merci à la production Anekdota de nous avoir autorisés à faire connaître cette création), et à sa maison de Rochefort, dans la série télévisée « Un auteur, une maison » par Patrick Poivre d’Arvor. Beaucoup de spectateurs nous ont fait part de leur surprise devant cette découverte de l’auteur et de sa vie, décidément déconcertants. Le téléfilm tiré de Mon Frère Yves (scénario Didier Decoin, réalisation P. Poivre d’Arvor) a été projeté un soir du colloque, dans une atmosphère confidentielle et dans des conditions matérielles peu favorables, mais cette sorte d’avant-première a été appréciée, en attendant la diffusion de l’œuvre à la télévision. Merci à Patrick Poivre d’Arvor de nous avoir confié ces deux téléfilms, ainsi qu’à la production 17 JUIN FICTION de nous avoir autorisé à projeter le second.

 

Le colloque sur le thème « Les Bretagnes de P. Loti » était un pari et l’Association P. Loti à Paimpol était sensible aux risques encourus par un projet qui réunissait divers types de publics, des plus avertis aux moins connaisseurs, venus de fort loin (Etats-Unis ou Grèce) ou des plus proches villages du Goëlo. À l’épreuve, on peut dire que le brassage souhaité s’est opéré de façon satisfaisante. Les interventions ont été suffisamment variées, et dans leurs thèmes et dans leurs formulations, pour que nous ayons recueilli des impressions très favorables à l’issue de ces deux journées. Certains ont davantage apprécié les exposés pas trop marqués par une technicité qui est quelquefois le lot des universitaires. D’autres ont reconnu le très bon niveau de réflexion analytique sur l’œuvre de P. Loti. Plusieurs communications ont eu un caractère personnel et vivant qui a suscité un véritable enthousiasme.

         Si l’on reprend les grands motifs que nous souhaitions illustrer, il nous semble que le contrat a été en grande partie respecté. A la question essentielle : « La Bretagne de P. Loti est-elle la vraie Bretagne ? » (C. Mahéo-Seïté), autour de laquelle finalement plusieurs exposés se sont cristallisés, des points de vue divers ont été proposés. Pierre Loti, dessinateur des sites de Camaret (D. Laroche), observateur-participant des mœurs et des rituels bretons dans Mon frère Yves (Fanch Postic), ou proposant une certaine figure de la femme bretonne (Karine Thépot-Caudan), a jeté sur le pays breton un regard documentaire et ethnographique. Mais la construction d’une sorte de Bretagne mythique, « exotique », a pris le pas comme on pouvait s’y attendre sur la vision naïve d’un écrivain qui n’aurait fait qu’enregistrer une réalité objective et donnée d’avance. Les rapprochements justifiés avec d’autres œuvres comme le Mariage de Loti (A. Lapique), ont permis de mieux comprendre la représentation d’une Bretagne « primitive ». Traitement que Loti d’ailleurs, à l’issue de sa « période bretonne », a fait subir dans des termes quasi identiques au pays basque et à ses habitants… (B. Vercier).

         Pour la réception de l’œuvre de Loti, la « rencontre » (différée ! mais émouvante et singulière) de Jean Kerleveo et de l’écrivain, a été décrite avec verve, humour et toute la précision historique requise par un proche du prélat (P. Kerlévéo). Autre manière de traiter le sujet : de couvertures de romans en images glanées chez des éditeurs du monde entier, la vision d’UN PÊCHEUR d’Islande se transforme parfois en PÊCHEURS d’Islande, dans une réécriture visuelle au fil du temps, privilégiant tantôt le travail du marin, isolé ou collectif, tantôt la romance amoureuse (A. Quella-Villéger).

         L’exposé attendu sur les circonstances de l’amitié de Renan et de Loti, a tenu ses promesses. Les « fragments d’émotion », retracés grâce au Journal et à une correspondance parfois inédite, ont été partagés par le public grâce à la belle reconstitution qu’en a faite J. Balcou.

         La réflexion sur les aspects littéraires a porté sur les relations complexes entre le Journal et les romans, sujet traité avec une grande subtilité (S. Nexon), sur l’annonce dans Fleurs d’ennui de thèmes et de personnages annonçant Mon Frère Yves (J. Nipi-Robin), et sur des rapprochements-oppositions entre Loti, Corbière et Guillou,  évoqués sur un mode vigoureux et convaincant (Y. Pelletier).

         La plus inattendue des contributions à ce colloque a été celle de l’amoureux américain de l’œuvre de P. Loti, Richard Berrong qui, en rapprochant la mort de Sylvestre, la guerre des Romains contre les Celtes-Gaulois, la campagne du Tonkin, le personnage de J. Ferry, la politique de l’éducation en France à l’égard des langues régionales à la fin du XIX° siècle, a cherché une cohérence autour du thème récurrent des comportements colonialistes.

 Le plus important à retenir est certainement l’esprit de convivialité et de cordialité qui a régné sur ces deux journées.

 Les Presses Universitaires de Rennes acceptent de recevoir les textes du colloque pour publication, moyennant bien entendu l’avis de leur comité éditorial. Nous nous efforcerons de leur présenter un volume de très bonne tenue, intégrant une iconographie indispensable.

 

A l’issue du colloque, malgré une fatigue bien compréhensible et un crachin breton « islandais », un groupe de personnes déterminées, sous la conduite de Claudia Leonardi, est parti sur les traces de Gaud, Yann, Yves Kermadec, se recueillir devant le mur des disparus en mer à Ploubazlanec, sous le porche de la chapelle de Perros-Hamon, sur le chemin de Kergrist vers la chaumière des Le Cor. La lecture brève ou simplement le silence ont mis une dernière touche d’émotion vécue et d’amitié à ces journées consacrées aux « Bretagnes de P. Loti ».

 

 

Nous remercions tous ceux, conférenciers ou « observateurs-participants », qui par leur présence, ont permis la réussite de ces rencontres.

L’Association P. Loti à Paimpol.