Docteur Hubert Albigès de Trenquelléon

Photographie prise en février 2009, au musée Hèbre de Saint-Clément lors de l' inauguration de l'exposition " L'Inde avec les Anglais".

(Collection particulière, reproduction interdite)

                    La nouvelle du décès brutal de Charles Hubert Albigès de Trenquelléon survenu le 10 mai 2009 à l’hôpital de La Rochelle nous a tous surpris et attristés. Il avait 72 ans. Ses obsèques ont été célébrées le 18 mai 2009 en l’église Saint-Louis de Rochefort. Sachant que cet ami très cher était mélomane, nous avons tenu à lui rendre un dernier hommage en musique, auquel ses amis de Rochefort ont été très sensibles, avec au violon notre fille Jeanne-Marie, à l’orgue Bernard Debande, et une partie de la chorale St-Vincent – dirigée par mon épouse - dont il appréciait les concerts. Il fut ensuite inhumé dans le caveau familial du cimetière de Rochefort entouré de sa sœur France Thalie.

                     Après des études au lycée Pierre Loti et à la faculté de médecine de Bordeaux, où il fut reçu docteur en médecine à l’âge de 23 ans, Charles Hubert Albigès de Trenquelléon devint directeur du Laboratoire de la Fondation de recherche en hormonologie et de ce fait était habilité à signer les résultats des analyses. Il cessa ses activités le 31 décembre 1988 et se retira à Rochefort.

                     Qu’il me soit permis d’évoquer des souvenirs personnels, dont nos rencontres lors des petits concerts familiaux à la corderie organisés par le Centre international de la Mer dans le cadre de « Monuments en Musique » (de 1990 à 1994) ; il y était très assidu. Il s’intéressait de près à la carrière musicale de nos enfants. Ami fidèle, discret et généreux, nous l’approchions avec délicatesse. Quand il vous avait adopté, il aimait volontiers vous recevoir chez lui pour boire le verre de l’amitié, comme ce 6 février où mon épouse et moi-même l’avons rencontré pour la dernière fois au cours d’un apéritif dînatoire très cordial auquel il nous avait lui-même convié. Il aimait deviser sur le microcosme rochefortais qu’il analysait avec perspicacité, finesse et beaucoup d’humour. Hubert était toujours de bon conseil quand on se confiait à lui et partageait entièrement vos préoccupations qui vous paraissaient alors plus légères. Ce soir là, nous avons parlé notamment du projet de réhabilitation de l’ancien magasin aux vivres, dossier qu’il suivait avec beaucoup d’intérêt. C’était devant un feu de cheminée, sous le regard de ses ancêtres dont les portraits proviennent du château de Trenquelléon (Lot-et-Garonne). Il en parlait comme s’ils étaient présents et aimait à évoquer le souvenir de son arrière-grand-tante Adèle de Batz de Trenquelléon, fondatrice des Filles de Marie (1789-1828) à l’initiative du père Chaminade.

                     Il s’intéressait à la vie culturelle de Rochefort. Membre de l’Association internationale des amis de Pierre Loti, il a toujours maintenu le lien avec M. et Mme Pierre-Loti-Viaud qu’il aimait recevoir lorsqu’ils venaient à Rochefort. La dernière fois que Mme Pierre-Loti-Viaud le revit, ce fut le 20 février lors de l’inauguration de l’exposition « L’Inde avec les Anglais ». Elle peut témoigner, elle aussi, qu’il se passionnait pour tout ce qu’il faisait : elle m’a ainsi confié qu’il tenait des dossiers sur cette association. Il soutenait aussi les activités du Comité rochefortais de documentation historique de la Marine dont je suis le secrétaire général.

                     Hubert était un esthète, un amoureux du patrimoine et du beau. Par fidélité à sa famille et respect pour elle, il a su restaurer et conserver le cachet ancien de son bel hôtel particulier du XVIIIe siècle dont il avait hérité et dans lequel sa mère Thalie, fille du docteur Deslandes, vécut ses dernières années entourée de l’affection de son fils. Au moment où la ville de Rochefort vient d’être sélectionnée pour y créer un secteur sauvegardé, avec pour conséquence principale une protection particulière pour les plus beaux intérieurs, pourquoi ne pas y faire une sorte de vitrine de la vie rochefortaise au XVIIIè siècle, à proximité d’une autre maison historique, celle de Pierre Loti. A ce propos, j’imagine qu’Hubert, en sortant de chez lui rue du Docteur Peltier, ne devait pas manquer de saluer l’illustre académicien et enfant de Rochefort, dont la statue du square Trivier orne le monument élevé en 1950 à l’occasion du centenaire de sa naissance…

                     Hubert était un personnage hors du commun, à la fois énigmatique et attachant, inattendu et imprévisible, volubile, on peut même parler de faconde méridionale, aimant converser avec ses amis qui le croisaient en ville, doué d’une grande vivacité d’esprit, élégant et presque théâtral. Après sa disparition, Rochefort n’est plus comme avant. Ses amis en garderont toujours le souvenir.  

                                                                                                                                                        Marc Fardet.